Anthropocène

S’il évolue toujours au gré de la variation des saisons, de la luminosité et des conditions climatiques, le paysage, façonné par l’action de l’homme, modelé par sa main et marqué de son empreinte, est finalement devenu, au fil du temps, plus culturel que naturel.

Désireux de matérialiser ce passage d’une nature originelle à un environnement profondément transformé par l’intervention humaine, Frédéric Rillardon a choisi,
pour donner libre cours à sa vision du paysage en 2017, d’utiliser la machine à coudre, envisagée comme processus à la fois de la mécanisation du travail (moteur de la création des paysages agro-industriels) et de la volonté de l’homme de « dompter » la nature pour répondre à ses besoins.

Dans ce travail, créations originales et tableaux inspirés d’œuvres marquantes de l’histoire de l’art se côtoient, pour dessiner un panorama mettant en lumière l’évolution du rôle et de la place de l’homme dans le paysage.

Sur une reproduction des scènes pastorales de Millet, chinée dans les brocantes, Frédéric Rillardon en redessine mécaniquement les sillons à l’aide de sa machine à coudre et, métamorphosant les champs de l’Angélus en stade de football, nous présente une société dans laquelle le sport, l’argent et le chronomètre tiennent désormais lieu de religion, tandis que les populations peinent à se nourrir. Le paysage devenu terrain de jeu…

Le regard qu’il pose sur Les Glaneuses est quasiment scientifique, émaillant le tableau de focus circulaires faisant écho à une vision microscopique du monde et aux boîtes de Petri utilisées pour la mise en culture de micro-organismes, qui esquissent d’autres paysages et dessinent les nouveaux horizons du déploiement de notre savoir-faire technique.

Par le jeu de la mécanisation, Les meules de Monet se muent quant à elles en balles de foin, dans des scènes dont la lumière et la composition demeurent toutefois fidèles à la recherche esthétique initiale du peintre de Giverny.

De même, la parcelle de colza rectiligne filant jusqu’à l’horizon n’est pas sans évoquer le Champ de blé aux corbeaux de Van Gogh, dans une version rationalisée, domestiquée, moins brute et tourmentée, dénuée de toute présence animale « nuisible ».

Plus loin, Frédéric Rillardon met en scène des environnements paysagers dans lesquels l’action et la présence humaine sont paradoxalement d’autant plus visibles qu’elles sont « gommées », découpées sur fond blanc, tout comme les alignements de croix, clin d’œil à la thématique de la vanité et de la nature morte, symbole ultime du lien unissant l’homme à la terre.

Filant la métaphore couturière, l’artiste tente enfin, dans un dernier élan, de « raccommoder » nature et culture, en usant de ses fils pour recoudre un tableau déchiré…

Laurence Cacaud  2017

« Ne cherchez pas le corbeaux »

40×30 cm Couture machine, acrylique

3 tableaux 15x15cm  Couture machine
3 tableaux 15x15cm Couture machine

« pavé » et « pavé H »

Couture machine sur impression numérique 23x32cm
Les glaneuses copie

« Petri plate »  Des Glaneuses de J.F Millet

50×70 cm

coutures à la machine sur une reproduction Des Glaneuses de J.F Millet

Maracana copie

« Maracana » d’après L’angelus de Millet

Peinture, couture machine, photo transfert
61×50 cm
Eat-&-Run

« Eat-And-Run »

Couture à la machine, peinture, photo transfert

48×40 cm

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« Tentative de raccommodage »

Couture à la machine sur Ready made peinture,

30x 40 cm